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La IIIème République (de 1900 à 1940)
Par Pierre Marchadour

 

En 1900, la IIIème République commence à prendre racine. Malgré les risques politiques encourus lors de la dernière décennie, le régime entame le nouveau siècle plus sereinement. L’affaire Dreyfus se termine, les attentats anarchistes se réduisent et les alliances internationales consolident la place centrale de la France sur l’échiquier européen. 

 

1900 - 1918 : D’une société de tensions à une société de guerre

Les tensions religieuses

Dès la fondation de la IIIème République, en 1870, les républicains opportunistes s’étaient attaqués à l’enseignement religieux. Les radicaux, au pouvoir depuis 1899, engagent à nouveau la lutte contre l’Église. Comme en 1880, les premières organisations touchées sont les congrégations. En 1900, le gouvernement dissout celle des Assomptionnistes. Un an plus tard, Waldeck-Rousseau soumet une loi à la Chambre des députés qui oblige les congrégations non autorisées à demander un vote pour leur reconnaître une personnalité juridique.

Les élections de 1902, qui voient les radicaux triompher à nouveau, confirment le raidissement de l’anticléricalisme d’Etat. La même année, les préfets ferment 2500 écoles appartenant aux congrégations qui n’avaient pas demandé l’autorisation d’enseigner. Deux ans plus tard, par la loi du 7 juillet 1904, l’État s’en prend cette fois aux congrégations autorisées. En réaction, plusieurs manifestations éclatent  (dont la plus mémorable reste sans doute celle de la Grande-Chartreuse), mais elles ne parviennent pas à faire plier le gouvernement radical. En 1913, il ne restera plus que 295 écoles religieuses, la plupart officiant désormais dans le domaine privé – que la loi Falloux de 1850 protège encore.

À la suite de l’affaire Morizot en 1907 (du nom d’un professeur ayant tenu des propos antipatriotiques et antireligieux à ses élèves), la guerre scolaire fait rage entre l’État et l’Église. Cette dernière tente, à travers la création de nombreuses associations catholiques (telles la Société générale d’éducation et d’enseignement et les associations des pères de familles) de défendre l’école libre. En 1914 seulement, grâce au ralliement de tous les mouvements politiques autour de l’Union sacrée, une trêve sera déclarée.

Après la question de l’enseignement, les radicaux se penchent sur les relations entre l’État et le Vatican. Depuis 1801, c’est le Concordat, ratifié par Napoléon Bonaparte et le Saint-Siège, qui les régit. Au début du XXe siècle, le gouvernement français doit toujours mettre des églises à disposition des évêques. Le traité oblige également le gouvernement à leur assurer, ainsi qu’aux curés, un traitement convenable. La loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État, dont le rapporteur est Aristide Briand, fait voler en éclats cet accord. Désormais, la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne plus aucun culte. Les biens des Églises sont remis à des associations cultuelles, créées d’après la loi de 1901. La séparation des Eglises et de l’Etat demeure en vigueur de nos jours, hormis en Alsace-Moselle, encore allemandes à l’origine et bénéficiant d’une exception en matière religieuse ( maintien du Concordat) depuis leur retour au territoire français (1919). 

 

L’Église répond avec véhémence à ces attaques. La loi sur les congrégations de 1904 déclenche une vague de manifestations contre le gouvernement. La loi de séparation des Églises et de l’État crée plus de remous encore, donnant lieu à la “querelle des inventaires”.

La remise des biens de l’Église à des associations cultuelles est prévue dans la loi. Pour les répertorier, le gouvernement organise une série d’inventaires sur l’ensemble du territoire en 1906. Ces opérations rencontrent une forte résistance, principalement dans les régions les plus attachées à la tradition catholique (Bretagne, Flandres et Massif Central). En effet, les croyants redoutent une spoliation, et dénoncent surtout l’ouverture des tabernacles, – acte sacrilège à leurs yeux. La situation dérape. Dans la ville de Montregard (Haute-Loire) un homme, grièvement blessé par les forces de l’ordre, meurt quelques jours plus tard. A Boeschepe (Nord), un paroissien est tué dans une église. Ces évènements provoquent la chute du gouvernement de Maurice Rouvier. Ferdinand Sarrien, nouveau président du Conseil, nomme Georges Clemenceau ministre de l’Intérieur. Ce dernier juge opportun d’apaiser les tensions en suspendant (mars 1906) les inventaires. Enfin, les évènements locaux et traditionnels comme les processions ou enterrements sont autorisés.

Malgré l’anticléricalisme gouvernemental, le clergé voit ses effectifs augmenter. En 1894, on compte 3 310 ordinations, chiffre qui s’établit à 4 680 en 1900 et restera stable, chaque année, jusqu’en 1914. Par ailleurs, certains courants catholiques souhaitent placer la religion au plus proche des mouvements sociaux et politiques de l’époque. Le catholicisme social, par exemple, bien conscient de l’influence socialiste dans le mouvement ouvrier, cherche à supplanter le thème de la lutte des classes par la doctrine de l’égalité mystique entre les hommes. Cette doctrine s’accompagne d’un volet politique, la démocratie chrétienne, qui rencontre un certain écho grâce à la publication de la revue Le Sillon (publié par Paul Renaudin et Marc Sangnier). Enfin, on redécouvre les philosophie et théologie thomistes (de saint Thomas d’Aquin) qui permettent de mieux lutter idéologiquement face aux discours rationalistes des radicaux.

Les tensions sociales

Outre l’état de conflictualité entre l’Église et l’État, la société est traversée par des mouvements de contestation sociale inédits. Les ouvriers trouvent dans les syndicats des organisations capables de défendre leurs intérêts. Les effectifs de la Confédération générale du Travail (CGT) croissent considérablement : 700 000 syndiqués en 1914 contre 200 000 en 1905. Avec un blanquiste, Victor Griffuelhes, comme secrétaire confédéral, et Georges Sorel comme maître à penser, le syndicat des travailleurs opte pour une stratégie de violence contre l’idéologie bourgeoise. Cette tactique est définitivement adoptée le 13 octobre 1906 avec l’adoption de la charte d’Amiens, date à partir de laquelle la CGT prône son indépendance de tout parti politique d’une part, et l’anarcho-syndicalisme comme méthode d’action de l’autre. L’opinion panique. La révolution sociale aura-t-elle lieu ?

Les trois années suivantes sont marquées par la répression que mène le gouvernement de Georges Clemenceau (qui est aussi ministre de l’Intérieur), nouvellement surnommé « le briseur de grèves ». Après l’accident de Courrières (1 100 morts à la suite d’une catastrophe minière), les grèves deviennent une puissante arme de contestation. Elles s’étendent à de nombreux secteurs en 1907 : les mines, les électriciens, la poste et les instituteurs. Le « Midi rouge » se rebelle contre la concurrence des vins algériens après des années de surproduction. Les manifestants trouvent même un improbable soutien dans le 17ème régiment d’infanterie stationné à Béziers. Mais le cabinet de Clemenceau, à l’aide de l’armée, mate violemment ces révoltes. Le bilan est amer pour la CGT : on dénombre une vingtaine de morts; et la révolution n’a pas eu lieu. Une dernière grève des cheminots échoue en 1910. Léon Jouhaux, successeur de Griffuelhes, qui a démissionné, s’engage dans la voie d’un syndicalisme plus réformiste.

Parallèlement à cette poussée de grogne en France, et aux tensions vives avec le monde catholique suscitées par leur anticléricalisme, les radicaux au pouvoir peinent à entretenir une relation de confiance avec l’armée. 

Les tensions avec l’armée

En 1905 éclate l’affaire des fiches. Le ministre de la Guerre, Louis André, utilise des fiches que lui communiquent notamment l’administration préfectorale et le Grand Orient de France pour connaître les opinions politiques et les convictions religieuses des officiers, et privilégier l’avancement des seuls républicains (aux dépens en particulier des catholiques pratiquants). Le socialiste Jean Jaurès soutient ce fichage tandis que le radical Louis-Lucien Klotz le désavoue : « La délation ne saurait faire aimer la république. » Le bloc des gauches se scinde et fait tomber le gouvernement Combes. Bien que les gouvernements suivants jouent sur l’apaisement avec l’armée, les fichages se poursuivront jusqu’en 1913. Cependant, aux premières heures de la Première guerre mondiale, le général Joffre évincera les officiers favorisés pour les remplacer par ceux entravés jusqu’alors par le fichage (ainsi d’ Édouard de Castelnau ou de Ferdinand Foch).

La montée des tensions internationales

Les troubles avec l’Allemagne s’intensifient à partir de 1905. Un an plus tôt, grâce à la série d’accords désignée sous le nom d’Entente cordiale, la France est parvenue à faire reconnaître au Royaume-Uni son protectorat sur le Maroc. L’Italie et l’Espagne y consentent aussi, tandis que l’Allemagne s’y oppose.  Le 31 mars 1905, l’empereur Guillaume II prononce le discours de Tanger dans lequel il réclame la souveraineté du sultan sur le territoire marocain, la liberté de commerce avec les entreprises allemandes et la prise en compte des intérêts allemands. Pour éviter une guerre à laquelle la France et ses alliés ne sont pas prêts, Maurice Rouvier et Théophile Delcassé, respectivement président du Conseil et ministre des Affaires étrangères, acceptent la conférence proposée par Guillaume II.

Après des discussions qui durent de janvier à avril 1906 dans la ville espagnole d’Algésiras, les Allemands reconnaissent à la France le droit d’assurer la sécurité à Rabat, Safi, Mogador et Mazagan (avec les Espagnols à Tanger et Casablanca) et obtiennent en contrepartie la liberté de commerce pour leurs intérêts économiques. La crise est désamorcée. Cependant en 1912, l’insurrection de Fès contre le protectorat français pousse la France à intervenir militairement. Prétextant la rupture de l’accord d’Algésiras, la canonnière allemande Panther se présente devant le port d’Agadir. À nouveau, le conflit est proche. Mais les deux partis parviennent à un nouvel accord : l’Allemagne promet de ne plus entraver l’action française au Maroc en échange d’une totale liberté commerciale. Un échange entre des territoires congolais (alors français) et camerounais (colonisés par les Allemands) a également lieu. Le prochain conflit ne prendra pas sa source dans les confins de l’Atlas.

C’est la poudrière des Balkans qui en sera l’origine. Depuis 1905, de nombreuses tensions règnent dans cette région. Les Serbes et leur roi Pierre Ier nourrissent le projet de regrouper les Yougoslaves (terme signifiant les « Slaves du Sud »), en un même Etat ; cependant, la Croatie est encore intégrée à l’Autriche-Hongrie. Pour contrer la menace yougoslave, l’empire des Habsbourg a lancé une guerre économique contre le royaume de Serbie et annexé la Bosnie-Herzégovine. La France reste immobile ; la Russie se pose en  protectrice du Royaume de Serbie. En 1912, la Ligue balkanique (Grèce, Serbie et Bulgarie) lance, puis gagne une guerre contre un Empire ottoman déclinant. Mais les trois vainqueurs ne parviennent pas à s’entendre sur le partage des territoires conquis. La Bulgarie, soutenue par l’empire austro-hongrois, est écrasée par la Serbie, armée par les Français et les Russes.

Dans ce contexte le 28 juin 1914, à Sarajevo, l’archiduc François-Ferdinand, héritier de la couronne d’Autriche, est assassiné par le nationaliste yougoslave Gavrilo Princip. Ce meurtre est l’étincelle d’un conflit qui va embraser l’Europe et le monde pendant quatre ans. 

En France, la mouvance socialiste s’est structurée autour de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO) en 1905. Toujours divisé entre les courants réformiste (incarné par Jean Jaurès) et révolutionnaire (représenté par Jules Guesde), le parti retrouve son unité lorsque la guerre approche. Pour eux, il n’est pas question d’engager les Français dans des combats meurtriers : ils deviendraient les instruments d’une guerre bourgeoise allant à l’encontre des intérêts de classe des prolétaires. La CGT adopte une position plus radicale encore : la grève contre la guerre doit devenir l’élément déclencheur d’une révolution générale.

Le 27 juillet, plus de 30 000 syndicalistes et socialistes se réunissent devant la rédaction du Matin, journal le plus belliciste de la presse française. Jaurès, qui voit la grève comme le moyen d’imposer la paix, rencontre à Bruxelles ses homologues socialistes allemands pour définir une position commune (plus tard, les syndicats allemands assureront au chancelier du Reich qu’ils n’entraveront pas la mobilisation). Cet effort se solde par un échec. Jaurès poursuit alors son combat pacifiste auprès de l’opinion publique grâce à L’Humanité, journal qu’il a créé en 1904. Mais le 31 juillet, Raoul Villain, nationaliste français, l’assassine au Café du Croissant. Le camp socialiste perd son garde-fou. Guesde, Édouard Vaillant et Marcel Sembat annoncent qu’ils feront leur devoir; l’antimilitariste Gustave Hervé transforme le titre de son journal La Guerre sociale en La Victoire. Raymond Poincaré, président de la République en 1914, annonce : « La France sera héroïquement défendue par tous ses fils, dont rien ne brisera devant l’ennemi l’union sacrée. » La guerre débute le 3 août.

La guerre

En 1914, la mobilisation générale est déclarée. Bien qu’une guerre d’une telle ampleur et entre belligérants aussi puissants n’a plus été vue depuis l’époque napoléonienne, l’opinion publique pense qu’elle sera de courte durée. Mais l’application par les Allemands du plan Schlieffen, qui prévoit d’attaquer en passant par la Belgique et le Luxembourg, met en difficulté l’armée française. D’abord stationnée en Lorraine, celle-ci est forcée de se replier vers Paris pour éviter l’encerclement. Le 9 septembre, les Français repoussent l’armée allemande au-delà de la Marne. Une course à la mer s’engage alors pour éviter tout nouveau mouvement enveloppant. Au début de l’année 1915, le front se stabilise, les soldats s’enterrent dans des tranchées s’étendant sur 800 kilomètres de front, de la mer du Nord jusqu’à la Suisse. Pendant trois années, les deux armées se livrent une sanglante guerre de position. L’invasion des territoires concentrant certaines productions stratégiques français (acier, fonte, laine…) oblige à une profonde réorganisation de l’économie, désormais entièrement au service de l’effort militaire : c’est la guerre totale. Clemenceau, lorsqu’il devient président du Conseil en 1917, le déclare :

Ma politique étrangère et ma politique intérieure c’est tout un : politique intérieure, je fais la guerre ; politique étrangère, je fais la guerre ; je fais toujours la guerre.

Cet engagement total du pays dans le conflit provoque de nombreux changements économiques et sociaux. Les campagnes et les usines se vident, 57% des ouvriers étant mobilisés. Le manque de main d’œuvre est comblé par le travail des femmes : 300 000 sont employées dans l’industrie de l’armement. Dans les territoires ruraux, le départ des hommes se traduit par une baisse de la production de blé à hauteur de 26 %. Les soldats étant la priorité, le niveau de vie chute d’autant plus à l’arrière. L’Union sacrée justifie même l’augmentation du temps de travail, sans contredit d’aucun syndicat. 

Malgré la conversion à l’économie de guerre des grands groupes industriels français, tels Citroën, Renault, Marius Berliet ou Boussac, l’État français, qui n’a pas prévu une guerre si longue, doit acheter massivement à l’étranger. Les importations dépassent les 11 milliards de francs en 1915, soit une augmentation de 25 % en un an. Le déficit public atteint 24 milliards. A ce prix la France résiste à Verdun, en 1916, aux offensives allemandes. Pour les quatre années de guerre le déficit extérieur va atteindre les 40 Mds de francs. Le 11 novembre 1918, le pays est victorieux.  Mais il dénombre 1, 4 millions de morts et des dettes représentant 200 % de son PIB. 

1918 - 1932 : La reconstruction et un nouvel équilibre mondial

La France ruinée et affaiblie

En 1919, la France a vaincu mais est affaiblie. Démographiquement, le retour de l’Alsace-Moselle, disposé dans le traité de Versailles, ne comble pas les 10,5% de la population active masculine morte lors des quatre années précédentes. En outre, 2 800 000 hommes sont blessés, 600 000 invalides – dont 56 000 amputés. Les « gueules cassées » témoignent non seulement de la violence physique des combats mais aussi de leur choc psychiatrique. Nombreux sont ceux qui auront du mal à regagner la vie civile, certains seront internés à vie. La classe paysanne a payé le plus lourd tribut : 50% des tués en proviennent. Ce chiffre compte, en plus de l’agriculteur, le fils unique destiné à reprendre l’exploitation. Combiné à l’inflation qui détruit l’économie paysanne, le nombre d’exploitations agricoles faiblit et beaucoup de ruraux fuiront vers les villes. Pour les ouvriers, un cinquième des victimes de la Grande Guerre viennent de leurs rangs. A leur retour du front, l’inflation cause la baisse de leur pouvoir d’achat et ils trouvent un allongement de la durée du travail. La République a perdu beaucoup de ses futurs cadres au combat (l’École Normale Supérieure est saignée avec 236 élèves ou anciens élèves morts, soit 17% des effectifs entre 1886 et 1917). Enfin, on compte 630 000 veuves de guerre et 750 000 orphelins. Pour compenser, les lois du 31 mars et 24 juin 1919 assurent aux invalides et aux victimes civiles une pension financée par l’État.

Le pays est à reconstruire. Le Nord et l’Est de la France, principaux théâtres de guerre, sont ravagés. Utilisés massivement pendant les combats, les obus défigurent les paysages et rendent incultivables deux millions d’hectares de terres fertiles. De plus, dans leur retraite, les Allemands ont détruit systématiquement les mines. Ainsi, alors qu’elle produisait 19 millions de tonnes de charbon avant-guerre, elles n’atteignent pas les 600 000 tonnes en 1919. Il faut également reconstruire les 280 000 maisons détruites et les 420 000 endommagées. Enfin, le Nord n’est plus relié au reste du territoire, les infrastructures de transports étant fortement dégradées (54 000 kilomètres de routes et 1 112 de voies ferrées).

Les conséquences sociales, religieuses, artistiques se font également sentir. L’après-guerre est le lieu d’une remise en cause de la morale traditionnelle. Beaucoup, qui ont vécu l’enfer dans les tranchées, se détournent de la foi.  En 1920, le nombre de divorces triple par rapport à 1914. L’Église opte pour une doctrine sociale et condamne en 1926 le traditionalisme de l’Action Française. Le courant du personnalisme, incarné par Emmanuel Mounier autour de la revue Esprit en 1932, se développe et promeut l’humanisme d’un catholicisme social.

De nouveaux courants artistiques apparaissent. Le mouvement dada de Tristan Tzara, qui tourne en dérision les traditions artistiques, séduit. André Breton s’en inspire dans son œuvre surréaliste, dont le leitmotiv est d’aller au-delà du contrôle de la raison. André Gide est une gloire littéraire reposant en partie sur une peinture de l’abandon aux plaisirs troubles de la pédophilie. Le jazz et le tango, tous les deux importés des Amériques, font fureur dans le monde parisien de la fête.

Le Traité de Versailles

Cinq ans jour pour jour après l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand, le traité de paix entre les Alliés et l’Allemagne est signé à Versailles en 1919. En tant que « premier responsable de la guerre », l’Allemagne doit payer des indemnités. La France retrouve l’Alsace-Moselle, elle prend possession des colonies du Cameroun et du Togo. La Sarre est placée sous contrôle international  (dans les faits, c’est la France qui administrera le territoire jusqu’en 1935). La Pologne, de nouveau tirée du néant politique, retrouve un Etat et un territoire, pris notamment sur d’anciens territoires prussiens, et sépare, par le corridor de Dantzig, le nouvel Etat allemand en deux parties. En tout, l’Allemagne perd 15% de sa superficie et 10% de sa population. Son armée est réduite à 100 000 hommes. Il lui est interdit d’approcher la rive gauche du Rhin. L’Allemagne doit payer à la France et la Belgique des réparations de guerre estimées à 132 milliards de marks-or. Ces sanctions inspireront à John Maynard Keynes Les conséquences économiques de la paix dans lequel l’économiste dénonce la brutalité du traité. A contrario, symbole de la pensée française de l’époque, l’historien de l’Action Française Jacques Bainville écrit Les conséquences politiques de la paix, dans lequel il prophétise « une paix trop douce pour ce qu’elle a de dur, et trop dur pour ce qu’elle a de doux”. Dès 1923, l’Allemagne ayant manqué à ses obligations de verser des indemnités, oblige la France à venir occuper  le bassin minier de la Ruhr (jusqu’en 1925). L’occupation française de la Rhénanie durera dix ans, les derniers soldats l’évacuant en 1930.

Les premières années du retour à la paix

La législature  les années de guerre se termine. De nouvelles élections se tiennent en 1919. Le Bloc national les remporte. C’est une coalition radicaux – droite modérée.  La SFIO qui, de 14 000 membres en 1918 passe à 178 000 en 1920, est partagée entre partisans de la IIIème internationale (émanation internationale du bolchévisme établi à Moscou sous la conduite de Lénine depuis la Révolution d’octobre 1917) et partisans de la IIe Internationale. Lors du deuxième congrès de la IIIème Internationale (Komintern), les socialistes ont reçu du président de l’organisation, Grigori Zinoviev, une liste de vingt et une conditions pour la rejoindre. Parmi celles-ci, la totale soumission à Moscou. Une majorité de 3 252 voix se prononce pour l’entrée du parti dans la IIIème Internationale : la Section française de l’Internationale communiste naît à Tours le 30 décembre 1920. Les 1022 voix contre restent dans la SFIO (« la vieille maison »), qui voit sa progression brusquement freinée. Le mouvement ouvrier se lance alors dans une nouvelle période de grèves et de manifestations (contre l’inflation et les salaires qui stagnent). Malgré le vote de la loi des huit heures quotidiennes de travail, la colère ne faiblit pas et le gouvernement d’Alexandre Millerand, ancien socialiste, choisit la répression, par crainte de la contagion révolutionnaire.

En 1924, le gouvernement Raymond Poincaré tombe, entraînant dans sa chute le Bloc national. La situation financière et monétaire de la France ne cesse de se dégrader depuis 1922. Elle est obligée de s’endetter auprès de la Banque d’Angleterre et de la banque Morgan, mais celles-ci posent des conditions impérieuses de redressement: Poincaré a dû faire voter à la Chambre un budget d’austérité (20 % d’augmentation d’impôts). L’impopularité qu’il en a retirée a été aggravée par la négociation du plan Dawes, pour un rééchelonnement des dettes de guerre allemandes, que rejette l’opinion française.  

Le Cartel des gauches  

Les élections de 1924 sont remportées par le Cartel des gauches (alliance de radicaux et de socialistes). Juste avant leur déroulement, Alexandre Millerand, président de la République depuis 1920, a proposé de revoir les lois constitutionnelles de 1875 pour donner plus de poids politique au pouvoir exécutif -au détriment du législatif. Pour ce motif, le Cartel, devenu majoritaire à la Chambre, refuse de gouverner si Millerand reste en fonctions, et le pousse à la démission le 11 juin 1924. Édouard Herriot nommé président du Conseil, le gouvernement du Cartel va développer une certaine activité en politique internationale. Dès 1924, la France reconnaît le gouvernement soviétique,  accepte le plan Dawes, et parvient, grâce à la relation forte tissée par les ministres des Affaires étrangères français, Aristide Briand, et allemand, Gustav Stresemann, à faire reconnaître à l’Allemagne ses frontières occidentales – en échange de l’évacuation de la Ruhr (accords de Locarno). Dans l’empire colonial, diverses rebellions éclatent. Au Maroc, les Rifains, menés par Abd-el-Krim, se révoltent contre les Espagnols, puis pénètrent sur les territoires du protectorat français. L’offensive rifaine sera stoppée par Pétain, envoyé de métropole pour remplacer Lyautey, en mai 1926. Abd-el-Krim est déporté à la Réunion. Cependant, les troubles se poursuivront encore jusqu’en 1934. Sur le territoire syrien qui, depuis la conférence de San Remo en 1920, est sous un mandat français, un soulèvement a lieu à Damas en 1925. La capitale ne sera pacifiée qu’en 1927. Enfin, en métropole, le cartel des gauches ne parvient pas à se sortir des difficultés financières. Les prix ne cessent de monter, les salaires ne suivent pas; le pouvoir d’achat est revenu à son niveau de 1913. Le déficit ne cesse d’augmenter et les socialistes, pourtant membre de l’alliance majoritaire à la Chambre, refusent de voter les plans d’austérité du gouvernement. Le cartel implose. Le président de la République Gaston Doumergue fait de nouveau appel à Raymond Poincaré.

La Chambre des députés demeurant majoritairement composée de radicaux et de socialistes, un gouvernement d’union nationale se constitue : sous la conduite de Poincaré, le républicain socialiste Briand conserve les Affaires étrangères, le radical Édouard Herriot prend en charge l’Instruction publique, les hommes de droite André Tardieu et Louis Marin ont respectivement le portefeuille des Travaux publics et des Pensions. Ce gouvernement réussit à rétablir l’équilibre dans les comptes publics grâce à l’augmentation des impôts et des taxes douanières mais également par des économies drastiques dans tous les ministères. En 1926, le budget est en équilibre. Une année plus tard, il est excédentaire. Les marchés financiers rassurés offrent les conditions du retour des capitaux étrangers en France. Contre toute attente, la France entame une période de prospérité. La production agricole retrouve son niveau d’avant guerre. Mais la mécanisation des outils nourrit l’exode rural des ouvriers agricoles. Une migration que le recensement de 1931 révèle : pour la première fois en France, la population urbaine dépasse en nombre celle des campagnes. C’est surtout le secteur industriel qui est en plein essor : la production sidérurgique ne cesse de croître, l’industrie automobile atteint les 250 000 véhicules vendus en 1929, traduisant la démocratisation de ce moyen de locomotion). Par ailleurs, les classes laborieuses voient leurs conditions s’améliorer. Les lois Loucheur de 1928 prévoient l’intervention de l’État pour financer l’habitat populaire. Plus de 200 000 habitations à bon marché (ancêtre des HLM) doivent être érigées. De surcroît, un commencement d’assurance sociale est accordé aux travailleurs disposant d’un plafond de salaire à 18 000 francs.

À Paris, les années folles se manifestent par une vie artistique foisonnante. Les cafés concerts laissent place au music-hall. Montparnasse devient le centre des plaisirs nocturnes et des courants artistiques avant-gardistes (surréalisme) Le cinéma parlant apparaît, populaire avec Jean Renoir, plus esthète avec Marcel Carné. Il trouve son jeune premier en la personne de Jean Gabin.  Les années folles sont celle d’un Paris qui se réinvente, aidé par la diffusion de l’électricité, de l’automobile, par la rapidité de l’information et une agitation permanente.

Briand et Stresemann maintiennent l’entente entre France et Allemagne. « Arrière les canons, les fusils, les mitrailleuses, arrière les voiles de deuil, place à l’arbitrage, à la sécurité et à la paix », clame le ministre français des Affaires étrangères. L’Allemagne entre à la Société des Nations et le plan Dawes, confirmé en 1929 par le plan Young, voile temporairement la permanente tension suscitée par les réparations. Les deux hommes obtiendront, par ailleurs, le Prix Nobel de la paix en 1926. La crise de 29 et la décennie 1930 prouveront que ces « années folles » n’étaient qu’un court instant de répit dans un monde toujours aussi dangereux. 

1932 - 1940 : Le temps des crises

En 1929, le krach boursier de New York bouleverse l’économie américaine, puis mondiale. Cependant en France, les répercussions ne sont sensibles qu’à partir de 1931. Alors, les prix baissent considérablement. Dans l’industrie, une déflation se mesure à 18 % en 1931, causant à la fois une baisse des salaires et une augmentation du chômage. Ce dernier est multiplié par dix de 1930 à 1931, passant de 18 000 à 190 000 personnes. . Enfin, le nombre de faillite des petits commerçants double entre 1930 et 1934. Face à cela, l’instabilité ministérielle traduit l’inefficacité à résoudre la crise. En vingt-mois (juin 1932-février 1933), six ministères se succèdent, cherchant désespérément une solution. Cette crise économique illustre les travers du parlementarisme.

Le temps des ligues d’extrême-droite

Depuis la fin des années 1920, les ligues d’extrême-droite se multiplient. Si l’Action Française (qui réclame le retour sur le trône de la famille d’Orléans) a été crée en 1899 pendant l’affaire Dreyfus, l’arrivée au pouvoir du fascisme en Italie, en 1923, et du nazisme en Allemagne, en 1933, électrisent les aspirations au pouvoir de ces organisations politiques. Répandu par une presse abondante (L’Écho de Paris, L’Ami du peuple, Candide, Gringoire, Je suis Partout), l’antiparlementarisme se développe, s’installe dans l’opinion, accentué par l’ instabilité gouvernementale chronique. En décembre 1933, Alexandre Stavisky, escroc notoire, détourne plus de 200 millions de francs en émettant de faux au bons au porteur sur le Crédit municipal de Bayonne . Il est retrouvé le 8 janvier 1934, mort d’une balle dans la tête à Chamonix. L’affaire prend une tournure plus politique lorsque l’enquête montre que Stavisky entretenait des relations avec les milieux politiques (parmi eux, Albert Dalimier, ancien ministre de la Justice et des Colonies). Rapidement, l’enjeu principal, que la presse de droite met en exergue, devient : à qui profite la mort de Stavisky ? Les accusations fantasmagoriques se déchaînent, et c’est tout le monde parlementaire qui est soupçonné de corruption. Les Ligues en profitent, et manifestent du 8 au 27 janvier. Maurice Pujo, fondateur des Camelots du roi, (service d’ordre de l’Action Française), invite les Parisiens à « venir en foule autour du Palais-Bourbon”, pour pousser ce cri  : “À bas les voleurs! ” . Au soir du 27 janvier, Camille Chautemps démissionne. Le 6 février, le nouveau ministère d’Edouard Daladier est investi à la Chambre. Mais, au même moment, les ligues et nombre d’anciens combattants, sont rassemblés devant le Palais-Bourbon, et provoquent la fuite des parlementaires. Ils se répandent ensuite sur la place de la Concorde, les grands boulevards, le Châtelet et le boulevard Sébastopol. Des heurts ont lieu pendant la nuit causant la mort de 16 personnes et des centaines de blessés. Daladier démissionne le lendemain déclarant “ce n’est pas une preuve de faiblesse que de reculer devant un massacre de bons et honnêtes citoyens”. Le pouvoir a vacillé et il a dépendu ce soir-là du colonel de La Rocque, président des Croix-de -feu (une association d’anciens combattants) de s’en emparer. Le lendemain, il appelle au calme.  Le 8 février, de nouvelles manifestations se tiennent à Paris. En réaction à la force des ligues, c’est cette fois le parti communiste français qui mobilise en masse. Les émeutes font 12 morts et des dizaines de blessés. Le président de la République Albert Lebrun fait appel à la figure consensuelle de Gaston Doumergue pour diriger le gouvernement. Les mouvements de droite se calment : la crise est passée. Néanmoins, les manifestations du 6 février 1934 laisseront leurs empreintes sur la gauche, qui prend conscience que l’expérience fasciste ou nazie de ses voisins, peut se produire aussi en France.

En 1932, la gauche n’a pas réussi à se réunir. Les radicaux ont voulu conserver leur rôle pivot entre le centre-droit et les socialistes. Les communistes, eux, se sont refusés à cette alliance en prétextant la traîtrise au socialisme de la SFIO. Mais Hitler arrivé au pouvoir en Allemagne, le Komintern modifie sa stratégie. Désormais, les communistes doivent s’allier aux autres forces de gauche en formant des fronts populaires contre la fascisation des sociétés d’Europe de l’Ouest. En 1936, Hitler rompt avec le traité de Versailles. Les troupes allemandes investissent de nouveau la Rhénanie, reforment des effectifs nombreux et se réarment massivement. Selon les nouvelles directives de Moscou, les communistes français dès 1935, dans le cadre des élections municipales, forment des alliances avec les socialistes et d’autres partis de gauche. Le 17 juin, ces formations lancent un appel commun : le programme à venir se constituera autour de trois axes : « le pain, la paix et la liberté ». Influencé par ses ” jeunes Turcs » (dont fait partie le jeune député Pierre Mendès -France), le parti radical se joint le 14 juillet à une manifestation de ce nouveau Front populaire. Celui-ci publie un programme, relativement modéré et parvient à remporter les élections législatives de 1936. Son leader, Léon Blum (SFIO) forme un gouvernement composé de dix-huit ministres issus de la SFIO et quatorze issus de radicaux (les communistes, menés par Maurice Thorez, préfére le soutenir plutôt que d’y participer). Pour la première fois, bien que n’ayant pas le droit de voter, des femmes entrent dans un gouvernement (Irène Joliot-Curie à la Recherche scientifique, Cécile Brunschwig à l’Education nationale avec Jean Zay et Suzanne Lacorre à la Protection de l’Enfance).

Le Front populaire s’attaque d’abord à la législation sociale. Il y est aidé par les circonstances. Des grèves spontanées, sans violence, consistant principalement en occupations d’usines, fleurissent dans toute la France, en mai et juin, en écho à la victoire électorale de la gauche. Paniqués, les milieux patronaux consentent à offrir de nouveaux droits aux travailleurs. Dans la nuit du 7 au 8 juin 1936, les accords de Matignon sont signés. Ils prévoient la reconnaissance, par les délégations patronales, de la liberté syndicale ; la création de délégués ouvriers dans les entreprises de plus de 10 employés (dans le but de veiller à l’application des conventions collectives ) et une augmentation des salaires ( 7 % pour les salaires les plus élevés; 15 % pour les bas salaires) . Enfin, ces accords sont complétés par les lois du 20 et 21 juin 1936 : tous les salariés bénéficient désormais de douze jours de congés payés; la semaine de 40 heures de travail est instituée. Pour autant, le Front populaire se heurte à de nombreuses difficultés. D’abord économiques et monétaires. La crise de 1937-1938 entrave le redressement économique et la surévaluation du franc handicape les exportations françaises, ce qui, par voie de conséquence, creuse le déficit commercial. Mais encore difficultés politiques: malgré leur dissolution, les ligues se reforment (Jacques Doriot, ancien membre du Parti communiste et futur collaborationniste, crée le Parti populaire français d’inspiration nazie;, La Rocque fonde le Parti social français; l’Action française survit). Difficultés coloniales enfin: Blum ne réussit pas à calmer les tensions en Indochine, en Tunisie, en Algérie. Le gouvernement de Front populaire tombe. Le radical Camille Chautemps lui succède mais ne parvient pas à rétablir l’équilibre financier. Blum reforme un second gouvernement (mars 1938)  mais il dure moins d’un mois . L’expérience du Front populaire est terminée. De cette expérience de gauche, restent les réformes sociales, la politique de Jean Zay à l’Education nationale (l’école devient obligatoire jusqu’à 14 ans) et le début du réarmement français face au péril allemand.

Les tensions internationales refont surface. Après l’Anschluss (le rattachement de l’Autriche à l’Allemagne était proscrit par le traité de Versailles), Hitler menace l’État tchécoslovaque. Au nom du droit à l’autodétermination des peuples, le dictateur allemand souhaite que le territoire des Sudètes, peuplé d’une population germanique, soient rattaché au Troisième Reich. La France, signataire  de la Petite Entente (Roumanie, Tchécoslovaquie et Yougoslavie), alliée militaire de la Tchécoslovaquie, signe cependant, comme l’Angleterre, les accords de Munich le 29 septembre 1939 qui préludent au démembrement de l’Etat tchécoslovaque.  L’Allemagne s’empare du territoire des Sudètes et s’assurera un peu plus tard, en mars 1939, de la sujétion de la majeure partie du territoire tchécoslovaque. 

Seulement vingt ans séparent les accords Munich de l’armistice de 1918. Un fort courant pacifiste règne dans les esprits (malgré la présence de nombreux Français dans les Brigades Internationales, la France n’intervient pas en Espagne, la laissant aux mains de Franco). Le traumatisme de la Grande guerre est toujours vivace. Au surplus, la défiance du communisme désarme les condamnations radicales à l’encontre de l’hitlérisme. La réalité rattrape pourtant le gouvernement français : aussitôt la Tchécoslovaquie avalée, l’Allemagne hitlérienne tourne ses appétits sur Dantzig et la Pologne. Dans la nuit du 23 au 24 août 1939, Ribbentrop et Molotov signent un pacte de non-agression germano-soviétique. La Pologne se retrouve la proie de ses deux puissants voisins. Malgré des dissensions internes, le Parti communiste français approuve la position de Moscou. Dans les jours qui suivent, il est interdit, ainsi que son organe de presse, l’Humanité. La guerre, inévitable, est  imminente.

Le 1er septembre, Dantzig est attaqué. Le 3 septembre, le Royaume-Uni et la France déclarent la guerre à l’Allemagne. Malgré quelques incursions françaises sur le territoire allemand, aucun combat d’envergure n’a lieu entre septembre 1939 et mai 1940. C’est la Drôle de guerre. Confiants dans leur stratégie défensive (la ligne Maginot, un ensemble de fortifications est érigé le long de la frontière belge, luxembourgeoise, allemande et suisse), les soldats français attendent le premier mouvement allemand. Le 10 mai 1940, la Wehrmacht pénètre sur les territoires belge et néerlandais. Croyant à la réédition du plan Schlieffen, une grande partie des forces françaises se précipite au secours des deux États menacés. Cependant, le gros des forces allemandes se dirigent vers les Ardennes, un massif forestier jugé difficilement franchissable par l’État-major français, puis perce le front près Sedan. Tournée, l’armée française se retrouve rapidement encerclée. L’avancée fulgurante de la Wehrmacht, l’exode massif des Français, Belges et Néerlandais sur les routes, et la décomposition de l’armée française conduisent Paul Reynaud à présenter sa démission. Le président de la République Albert Lebrun fait alors appel à une gloire nationale, le maréchal Philippe Pétain, vainqueur de Verdun, déjà membre depuis quelques jours du gouvernement démissionnaire, et décidé à demander un armistice. Ce dernier est signé le 22 juin 1940 dans la forêt de Compiègne, à l’intérieur du même wagon que celui où Foch avait signé l’armistice victorieux de 1918. Bien que le 18 juin 1940 le Général de Gaulle ait appelé, sur la BBC, les Français à résister ou à rejoindre les forces françaises libres, peu l’ont écouté. Le 10 juillet 1940 au théâtre du Grand casino de Vichy, la Chambre des députés et le Sénat réunis en Assemblée Nationale votent les pleins pouvoirs constituants à Philippe Pétain (par 561 voix contre 80). Le régime de Vichy est naît. La IIIème République meurt sous une pluie d’applaudissements.

 

Illustration : William Orpen (1878–1931), The Signing of Peace in the Hall of Mirrors, Versailles, 28th June 1919 (détail), huile sur toile, 1919.

Imperial War Museum London (Royaume-Uni)


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